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Les M&A : un marché en plein essor
Image de Carlos Muza

En 2015, les fusions-acquisitions (M&A en anglais pour merger and acquisition) atteignaient un montant record de 5000 milliards de dollars. En 2021, ce record fut battu par la somme de 5800 milliards de dollars (établissant ainsi une hausse de 64% par rapport à 2020) et les grands cabinets de conseil comme Bain & Company, KPMG ou encore McKinsey & Company, pour ne citer qu’eux, se montrent optimistes quant à l’évolution de ce marché complexe pilier de la stratégie d’entreprise. Il semble donc que malgré le coup porté à l’économie mondiale par la crise du Covid-19, ce marché a su rester fonctionnel notamment grâce à de fortes liquidités rendues disponibles par de faibles de taux d’intérêt induits par les politiques des Banques centrales ainsi que l’incitation d’investissement créée par les forts taux d’inflations auprès des investisseurs. Nous pouvons également évoquer les hauts cours de bourse corrélés à la bonne évolution du marché des M&A d’après des analystes de Morgan Stanley. Il faut cependant savoir qu’une opération de M&A peut s’avérer être risquée et n’induit pas toujours le succès escompté, c’est par exemple le cas du rachat de ABN Amro par RFS Holdings en 2007 qui, après la crise des subprimes de 2008, a, in fine, fragilisé le groupe plus qu’il ne l’a consolidé.

Mais qu’est-ce qu’une fusion/acquisition et comment ce marché fonctionne-t-il ? Eh bien, il s’agit d’opérations financières et juridiques complexes se traduisant par un regroupement d’entreprises via le rachat d’une part importante des parts d’une entreprise par une autre. L’entreprise acquise peut conserver son entité juridique propre ou bien fusionner avec la société mère afin de disparaître. Il est également possible pour des sociétés de fusionner, disparaissant ainsi en vue de créer une nouvelle entité juridique. Il est également possible de voir des scissions d’entreprises se faire (demerger en anglais). De telles transactions nécessitent l’effort de plusieurs spécialistes allant de banquiers d’affaires qui se chargeront de l’aspect financier de la transaction aux avocats d’affaires s’occupant du prisme juridique en passant par des cabinets de conseil qui produiront des rapports sur l’opération. Une fois le « deal » conclu, les parties signent un contrat d’achat/cession (SPA : Share Purchase Agreement en anglais) qui officialise le deal.  Ces opérations sont répertoriées en fonction de leur objectif : on parle de concentration verticale lorsqu’une firme a pour but de racheter des fournisseurs ou des clients (elle rachète donc sa supplychain), de concentration horizontale lorsque l’objet de l’opération s’avère être une prise de parts de marché par le rachat de concurrents et dans le cas de diversification inter-industrielle en vue de diminuer le risque en cas de récession dans un secteur, nous parlons de « conglomérats » d’entreprises. Il faut également distinguer les M&A publiques (lorsqu’au moins une partie du contrat est cotée en bourse) des M&A privées (lorsque les parties du contrat ne sont pas cotées en bourse).

L’histoire a vu de nombreux deals se conclure à différentes échelles, afin quantifier les propos tenus dans cet article, voici certains des plus gros deals ayant vu le jour, dits « megadeals » : l’acquisition de Mannesmann AG par Vodafone AirTouch pour 202,8 milliards de dollars en février 2000 (télécoms), l’acquisition de SABMiller par AB Inbev pour 110,3 milliards de dollars en octobre 2016 (boissons), le rachat de ABN Amro par RFS Holdings pour la somme de 98,2 milliards de dollars en 2007 (secteur bancaire), la fusion entre Shell Transport and Trading et Royal Dutch induisant la naissance de Royal Dutch Petroleum en 2005 moyennant la somme de 95,4 milliards de dollars (énergétique), l’acquisition de BellSouth par le mastodonte américain des télécommunications AT&T en 2006 pour 89,4 milliards de dollars (BellSouth faisait autrefois partie de AT&T qui avait été obligée par les autorités régulatrices américaines à s’en séparer en 1984 avant d’être rachetée environ 20 ans plus tard) ou encore le rachat, en 1999, de Warner-Lambert par Pfizer pour 88,8 milliards de dollars (pharmaceutique).

La Suisse a su tirer son épingle du jeu lors de l’année 2021 avec les fusions-acquisitions, cela faisait en effet plus de dix ans qu’il ne s’était pas vu autant d’opérations de M&A en son sein, soit 604 contre 363 pour 2020. Les secteurs les plus effervescents de ce côté sont ceux de la technologie (comprenant télécommunications, médias et technologie) ayant vu un volume de 20 milliards de dollars défiler cette année, celui de l’industrie qui a eu droit à environ 10 milliards de dollars et ceux de la pharmaceutique et des sciences de la vie dont le volume de transaction a avoisiné les 56 milliards de dollars en 2021. Notez que le pharmaceutique et les sciences de la vie doivent tout de même le 37,5% de ce volume de transaction à la seule vente des actions Roche que détenait Novartis à Roche pour un montant approximatif de 21 milliards de dollars.

Nous pouvons conclure que les fusions-acquisitions ont, à priori, de beaux jours devant elles. La levée de la grande partie des mesures de lutte contre le Covid-19, les faibles taux d’intérêt permettant des investissements peu coûteux, les forts taux inflationnistes, la montée en puissance des SPAC (article rédigé en 2021 par Jean-Baptiste Guillemin : https://www.financeclubhec.com/les-spac) ainsi que les rapports et articles publiés par divers experts et cabinets de conseils laissent présager ce scénario. Toutefois, il est bon de rappeler que notre époque est caractérisée par l’acronyme VUCA (volatility, uncertainty, complexity and ambiguity) qui illustre bien le fait que l’on n’est jamais certain de quoi sera fait demain tant l’effervescence et le dynamisme du marché mondial n’ont cesse de se complexifier, de ce fait, il vaut mieux rester vigilant et critique sur l’état des marchés aujourd’hui afin de ne pas se retrouver sans lendemain.

Sources : 

https://www.lemanbleu.ch/fr/Actualite/Economie/Les-fusions-acquisitions-ont-fait-recettes-en-2021.html

https://home.kpmg/ch/fr/home/media/press-releases/2022/01/plus-de-fusions-et-acquisitions-avec-participation-suisse.html

https://photo.capital.fr/les-10-plus-grosses-fusions-et-acquisitions-de-l-histoire-19325#4-ab-inbev-sabmiller-110-3-milliards-de-dollars-345146

https://fr.wikipedia.org/wiki/Fusion-acquisition

Filipe Duarte, 25 avril 2022

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